Le Repaire de Gulix

Avent 2024 - Dans les backrooms - Final

Tout avait commencé par cette idée de rejouer à Après l'Accident (qui est en promo, avec tous mes jeux, jusqu'à la fin de l'année) pendant les fêtes, une entrée par jour. Une histoire imprévisible, tant pour le lecteur que pour moi, puisque le tirage des cartes m'amenait à improvisait cette histoire.

Une histoire en 25 morceaux, donc. Avec une première partie qui explorait les salles jaunes des Backrooms. Puis une seconde partie qui se laissait plus aller vers d'autres environnements.

Cette histoire a maintenant une conclusion. La voici.

Entrée 15 - 5 de Pique

Il s'agit de la piste Animal intégrée plus tôt dans la partie.

Journal d'exploration d'Alicia. Les papillons sont revenus pendant mon sommeil. J'ai senti quelque chose sur mon visage. Comme un effleurement. J'étais recouverte d'une centaine d'entre eux. J'ai paniqué et je me suis levée d'un coup, me secouant dans tous les sens. Ils se sont tous envolés et ils ont disparus dans les néons du plafond. Oui, ça semble étrange, mais j'ai du mal à l'expliquer autrement. C'était comme s'ils s'y étaient fondus.

J'ai eu peur de les avoir perdus pour toujours, à cause de ce coup de panique. Puis je me suis calmée, et je me suis rassise contre le pilier. J'ai attendu, fixant les néons. Et puis l'un d'eux est rapparu. Puis un autre. Puis un autre. Ils se sont approchés de moi, et je les ai laissés se poser sur moi, ce coup-ci.

Puis je me suis levée doucement. Je leur ai demandé de me guider, et ils se sont envolés. Il y en avait une douzaine environ, volant tous dans la même direction. Je les ai suivi. Ils m'ont mené à un niveau inférieur. C'est la première fois que je redescend dans ce dédale, et cela m'a fait un coup. Est-ce une nouvelle étape ?

Le pilier était marqué lui aussi. "Wait here". J'attends. Je me suis installée contre le pilier, et les papillons sont repartis dans les rares néons allumés. J'attends.

Entrée 16 - 4 de Pique

Il s'agit de la piste Message intégrée plus tôt dans la partie.

Journal d'exploration d'Alicia. J'ai attendu. Je me suis assoupie. Et j'ai été réveillée pa un... kaléidoscope de papillons. Hé, je crois que c'est comme ça comme on dit, au moins en anglais. Je trouve ça joli. Même s'ils sont tous blancs, et que je ne crois pas que ça valide, de fait, l'appellation de kaléidoscope. Dommage, je n'ai pas de dico sous la main.

Je m'égare.

Ce coup-ci, je ne me suis pas affolée de voir tous ces papillons sur moi. Je me suis levée calmement. Même si mon coeur battait à cent à l'heure. Et je les ai laissés me guider. Vers ce que je crois être la fin de ce long parking. Il y a une double porte. Je ne l'ai pas poussée. Les papillons se sont dispersés aux quatre coins de cette grande salle, où chaque pilier est recouvert d'écritures.

Ce sont toujours des graffitis, mais l'écriture est plus nerveuse, plus fine, et j'ai l'impression que plusieurs personnes ont participé. L'écriture n'est pas la même partout. Et les messages racontent tous des errances.

"J'ai suivi le lapin blanc." "Seul l'écho de mes pas me suit." "Ce n'est pas nous qui partons, c'est l'endroit qui nous relâche." "Ne faites pas confiance à vos sens." "Il vous attend au niveau 18." "Il n'est pas possible de mourir si on est déjà mort." "Qui suis-je vraiment ?"

Le plus étrange là-dedans, ce que je suis certain que ces messages sont tous dans des langues étrangères. Et à part quelques bribes d'anglais, c'est un peu l'inconnu pour moi tout ça. Mais je suis parfaitement capable de les lire et les comprendre.

D'autres que moi sont passés ici. Et je sais que je vais aussi laisser ma marque. Comment ? Je ne sais pas. Je vais pousser la porte et voir ce qui m'attend de l'autre côté.

Un emplacement de parking souterrain, vide

Entrée 17 - 8 de Trèfle

Journal d'errance d'Alicia. Je pensais avoir touché au but. Ces papillons. Ces messages. Mais je pense que j'ai halluciné. Cela fait plusieurs heures. Je crois. Plusieurs heures ? Est-ce que je me suis arrêtée ? Je ne sais même plus.

Cela fait plusieurs heures que j'ai passé ces doubles portes. Je les ai poussées pour me retrouver dans un long couloir. Comme dans un lycée de ces séries qui passent à la télé, avec leurs rangées de casiers. Il n'y a pas de numéros sur les casiers. Ou plutôt si, mais ce ne sont pas des numéros. Parfois, ça ressemble à des lettres, à des symboles. De nombreux embranchements parsèment l'endroit. Toujours ces couloirs avec des casiers. Parfois des portes, simples. Qui ne veulent pas bouger. Parfois une double porte mène... sur d'autres couloirs.

J'ai essayé de faire machine arrière, mais je me fais une évidence. Je ne retrouverai jamais le parking. Peut-être n'y suis-je même jamais allée. Je ne me fie plus à rien. Deux fois déjà. Je crois. Deux fois une sonnerie stridente a retentit. Je suis sûre que c'est celle qu'on entend dans ce genre d'école. Et j'étais persuadée que des myriades d'élèves sortaient de ces classes, me bousculaient. Mon corps a réagi deux fois de cette façon. Mais il n'y a rien autour de moi.

Je me suis assise dos à un casier. En face, on dirait 5ERZ noté dessus. Mais le 5 est à l'envers, le E ressemble à un trois, et le R et le Z sont comme liés. Je ne sais plus lire. Je ne sais plus rien en fait. Je perds la tête. Je ne sais même pas si je l'ai déjà eue bien attachée.

Je vais peut-être restée là. Et attendre.

J'ai choisi de ne pas utiliser de Piste, car elles ne me disaient rien dans le contexte de l'histoire.

Entrée 18 - 4 de Carreau

Journal d'exploration d'Alicia. Je perds peut-être la boule. Sans doute même. Mais j'ai choisi de ne pas me laisser faire. J'ai l'impression. Non ! Je sais que je ne suis pas seule ici. J'ai entendu des chuchotements. Des râles, presque. Qui venaient d'une vieille sono grésillante accrochée au plafond. Comme celle par laquelle communiquerait un principal de lycée.

Et autant dire que ça n'a pas l'air bienveillant. Je suis Thésée dans le labyrinthe, et si c'est le minotaure, il aura fort à faire. J'ai remarqué une fontaine avec un robinet métallique. Il fonctionnait. Je l'ai défoncé. J'ai tiré dessus de tout mon poids. J'ai entendu le métal se tordre et d'un coup un truc a lâché.

L'eau a coulé de partout. J'étais trempé. Je le suis toujours, mais je me suis éloignée de l'endroit. Mais maintenant, j'ai un tuyau en... quoi ? cuivre ? fonte ? Aucune idée. En métal. Il est un peu plus long que mon bras, et j'arrive à le tenir que de la main gauche. Mais si quelque chose s'approche, je le tabasse avec. Au pire, ça l'énervera assez pour qu'il en finisse avec moi et ce calvaire. Au mieux, je survivrai un jour de plus. Au mieux...

J'attends encore un peu. J'attends la prochaine sonnerie. Ou le prochain message à la sono. Et après... ben j'ai aucune foutrement d'idée de ce que je vais faire. Ce sera peut-être mon dernier message. Ciao bye !

Couloir du lycée

Entrée 19 - Dame de Trèfle

La voix qu'on entend est légèrement essoufflée.

Journal d'exploration d'Alicia. Je ne sais pas pourquoi je commence avec ça à chaque fois. Je n'explore plus depuis des lustres. J'essaie tant bien que mal de survivre.

Survivre. Je pense que c'est le bon mot. Je l'ai rencontré. Le mannequin. Est-ce que c'est lui que j'entendais à travers le micro ? Je ne sais pas. Mais je l'ai entendu arrivé. Il tapait du poing contre les casiers. J'ai vu sa silhouette toute blanche approcher. J'ai attendu. Je ne savais pas ses intentions. Je ne les connais toujours pas.

Quand il est arrivé à une dizaine de mètres de moi, il s'est arrêté. J'ai eu l'impression qu'il me scrutait. Puis son pas s'est accéléré. J'étais déjà levée, mes affaires sur moi. J'ai fait marche arrière, le gardant en face de moi, mais il a commencé à marcher plus vite que moi.

J'ai choisi l'offensive. J'ai fait un bon vers lui pour le frapper du tuyau que j'avais en main. Il a crié. Un son... grésillant ? Comme s'il venait des vieilles sonos que je vois au plafond. Mon coup l'avait envoyé au sol. Mais il s'est relevé. J'aurais dû le frapper encore et encore. Mais. Je ne sais pas. Je suis restée quelques instants figée, il s'est agité et a couru vers moi. J'ai senti ses pas dans mon dos, j'ai senti qu'il m'agrippait, j'ai hurlé. Je crois. Puis j'ai entendu un déchirement et un bruit de chute. J'ai sprinté pendant quelques minutes. Je viens à peine de m'arrêter.

Il m'a arraché Lenny. Je vois les fils arrachés qui le tenaient sur mon sac. Il m'a pris Lenny. Je ne sais pas où aller, mais j'ai un but maintenant.

Entrée 20 - Roi de Trèfle

A celui ou celle qui écoutera ce message, si jamais vous vous retrouvez dans ces mêmes couloirs, et que vous voyez quantité de casiers défoncés : c'est moi.

Je n'ai pas revu le mannequin, mais je le cherche, et je marque mon passage en abimant ces casiers. Un à la fois par section. Ca me permet de savoir quand je tourne en rond. Ce qui m'arrive pas mal visiblement. Alors que j'essaie de me faire une carte mentale de la disposition des lieux. Mais je crois que c'est peine perdue et que ce labyrinthe est vivant.

Je vais un boucan monstre, en tout cas. Mais je m'en fiche. Je ne cherche plus à être discrète. Je veux qu'on me trouve. J'en ai marre de la solitude. Je veux de la compagnie, qu'elle soit hostile, amicale ou... étrange. Je veux en finir avec tout ça.

LAISSEZ-MOI PARTIR !

Mannequins

Entrée 21 - Valet de Trèfle

De l'eau ! Il y a de l'eau partout au sol ! Prise de fatigue, je me suis posée entre deux séries de casiers, collée à une de ces portes impossibles à ouvrir et même à forcer. Et j'ai été réveillée par ce froid humide sur mes fesses.

Un filet d'eau qui coulait sur le dallage, qui montait. Ce n'est quand même pas le tuyau que j'ai pété l'autre jour qui a provoqué ça ? Depuis le temps... Et puis, tout est recouvert d'eau, là. Tous les couloirs. J'ai commencé à bouger et c'est le cas partout.

Là, j'en ai déjà jusqu'aux mollets. Ca monte vite, et à ce rythme, je me noie dans quelques heures. J'ai jeté quelques papiers que j'avais, et il semblerait qu'il y ait un faible courant. Je vais aller dans son sens. Ca va m'amener là où l'eau se déverse, et je pense que ce sera plus sûr que d'aller vers là d'où vient l'eau.

Je n'en peux plus. Mes affaires sont trempées, je suis crevée, j'ai de moins en moins de force. A chaque fois que je prends de nouvelles résolutions, on dirait que l'endroit s'acharne sur moi.

Entrée 22 - 6 de Trèfle

L'eau semble avoir arrêté de monter. Elle m'arrive quand même à mi-cuissse. C'est difficile de se déplacer et, je ne sais pas trop pourquoi, j'essaie de conserver ce dictaphone hors de portée de l'eau. C'est comme si c'était une ancre vers la réalité.

En parlant d'ancre. Je crois que j'ai trouvé une sortie à ces tunnels. Une porte ouverte qui mène à un escalier de fer. Qui monte et qui descend. Et par où toute l'eau coule. La logique pousserait à ce que je prenne cet escalier, que je monte et que... que quoi ? Que je me retrouve dans un autre endroit étrange, aux règles incompréhensibles.

Mais alors que j'allais faire un pas vers le passage de cette porte, je me suis arrêtée. Lenny est encore dans le coin. Je le sens au plus profond de moi. Comme s'il m'appelait. Ce bout de peluche m'a accompagné dans toutes mes expéditions, il n'est pas question que je l'abandonne.

Je sais qu'il y a quelque chose d'important en haut de cet escalier. Je dois rester proche, pour pouvoir le retrouver. Mais je dois aussi retrouver Lenny. Sans doute en compagnie de ce maudit mannequin. Qui doit flotter quelque part dans le coin. Le flux de l'eau va l'amener par ici.

Je l'attends.

Entrée 23 - 7 de Trèfle

Journal d'exploration d'Alicia. Sans doute la dernière entrée. Le voyant de batterie du dictaphone clignote, et je n'ai aucun moyen de le recharger. Je n'ai revu ni Lenny ni le mannequin. J'ai essayé de me mettre au sec sur les marches de l'escalier. A première vue, la porte ne se referme pas, poussée contre le mur par l'eau.

Celle-ci continue de grimper. J'ai pu facilement le constater avec les marches. Je pense qu'elle m'atteindrait la taille, maintenant. Autant dire qu'il est peu probable que je reparte par là. Je vais grimper. Je n'ai aucune idée de ce qui m'attend là-haut.

Si quelqu'un tombe sur ces messages un jour, et arrive à retourner... dans la vraie vie ? Ou là où les vrais gens vivent. Si quelqu'un y parvient, merci de transmettre cette cassette à Elodie Kergoff, qui devrait vivre à Rennes. Ou dans les environs. PixiePen sur les réseaux internet. Elodie. Désolée. Ca n'aurait pas dû finir comme ça.

Je garde cet appareil sur moi. Je monte les escaliers. Il y a une porte là-haut. Je vais tomber sur quoi, maintenant ? Une piscine ? Un centre-commercial ? Un bunker de l'armée ?

Adieu Lenny.

Entrée 24 - As de Pique

Ceci est la carte de Fin de l'histoire. Je regroupe les trois cartes Pique de figures, et j'en tire une au hasard : Valet de Pique.

Bon, il reste encore un peu de batterie, visiblement. J'ai monté les escaliers et poussé cette porte. Pour l'instant, je m'y tiens. Je la coince avec mon pied. Devant moi, il y a un long couloir blanc. On dirait un endroit tiré d'un laboratoire.

Il y a une douzaine de portes que je peux voir. Des portes grises. Je vais aller voir ce qu'il s'y trouve. Je risque quoi... Oh, toutes les portes...

Battery empty

Un long couloir blanc

Crédits photo

Bilan et conclusion

J'ai pris beaucoup de plaisir à écrire cette histoire. Cela me donne envie de me relancer dans l'écriture régulière, c'est dire. J'ai noté de petites choses sur le jeu, qui ont sans doute à voir aussi avec l'environnement plus qu'étrange dans lequel je me suis plongé. Des cartes qui faisaient redites, des pistes qui avaient beaucoup de mal à coller. J'ai des idées pour une petite extension, qui pourrait débarquer un de ces quatre. On verra (j'ai tellement de trucs sur le feu).

Cette histoire aurait mérité un support audio similaire à celui qui est employé par sa narratrice. Je ne suis pas outillé pour, je n'ai pas forcément les compétences nécessaires non plus. Mais si quelqu'un veut s'en emparer pour en faire quelque chose, qu'il n'hésite pas à me contacter.

Dans quelques jours, je republierai le texte final, complet, dans un format à la fois texte brut, mais aussi epub. J'en profiterai pour peut-être retravailler un peu certains passages.

En attendant, Joyeux Noël, et faites attention aux escaliers dans les fabriques de mannequins abandonnées.